Le retrait américain de l’OMS
June 16, 2020
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La menace a été mise à exécution et a stupéfait le monde entier. En pleine crise sanitaire liée au Covid-19, le Président Donald Trump a annoncé le 29 mai dernier que les Etats-Unis coupaient toute relation avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS); organisation chargée de sauvegarder la santé publique à travers le monde. Cette dernière se voit ainsi privée d’une part importante de son faible budget.
Le 19 mai, le président avait déjà suspendu temporairement le financement américain. Sur Twitter, il a écrit: «Si l’OMS ne s’engage pas à des améliorations notables dans un délai de 30 jours, je vais transformer la suspension temporaire du financement envers l’OMS en une mesure permanente et reconsidérer notre qualité de membre au sein de l’organisation ». Il aura donc laissé moins de temps qu’initialement annoncé pour prendre une décision qualifiée de « radicale ». Son annonce a provoqué de nombreuses consternations à travers le monde.
Reproche du président américain envers l’OMS
Le président américain reproche à l’agence de l’ONU de s’être alignée sur les positions de la Chine en dissimulant la gravité du virus lorsqu’il y a fait son apparition au mois de décembre dernier, ce qui aurait empêché de prévenir l’épidémie. Il blâme ainsi la Chine d’une crise qui a tué jusqu’à présent plus de 100 000 personnes aux États-Unis, pays enregistrant désormais le plus de décès, devant l’Italie, l’Espagne et la France. “Le monde souffre aujourd’hui des méfaits du gouvernement chinois”, a déclaré M. Trump dans un discours prononcé à la roseraie de la Maison Blanche. “D’innombrables vies ont été perdues et de profondes difficultés économiques ont été infligées dans le monde entier”. Il a également déclaré que les Etats-Unis allaient «rediriger ces fonds vers d’autres besoins de santé publique urgents et mondiaux qui le méritent».
Le budget de l’OMS
Immense organisation de 7000 employés à travers le monde, son fonctionnement et ses missions dépendent des crédits accordés par ses Etats membres et les dons de bienfaiteurs privés. Dotée de 2,8 milliards de dollars par an, l’OMS a « le budget d’un hôpital de taille moyenne dans un pays développé», a récemment déploré son secrétaire général, Tedros Adhanom Ghebreyesus, ancien ministre de la santé de l’Éthiopie.
La contribution américaine à l’OMS
Il existe deux types de donations des pays à l’OMS: les contributions fixées et les contributions volontaires. Les contributions fixées constituent la majeure partie du budget. Elles sont versées par les pays qui veulent être membres de l’organisation et sont calculées “en fonction de la fortune et de la population du pays”, précise l’OMS sur son site. Les contributions volontaires peuvent provenir d’États membre (en plus des contributions fixées) et d’autres partenaires.
Premiers bailleurs de fonds devant la Chine, la Fondation Bill et Melinda Gates (premier contributeur privé), l’alliance du vaccin Gavi, le Japon, le Royaume-Uni et l’Allemagne, la contribution américaine se chiffre aux environs de $401 millions en contributions volontaires selon les chiffres datant de 2017 (les derniers disponibles) et $115,7 millions en contributions fixes selon les chiffres datant de 2020.
La Chine, quant à elle, paye $10 millions en contributions volontaires (chiffres 2017) et $57,4 millions en contributions fixes (chiffres 2020). Donald Trump y voit ainsi un motif sérieux pour réclamer « des comptes ». Enfin, la France, elle, paye $13 millions en contributions volontaires et $21,2 millions en contributions fixes.
Ce graphique montre les contributions fixées des États membres de l’Organisation mondiale de la Santé en 2020.
La contribution américaine va essentiellement en Afrique et au Moyen-Orient. Environ un tiers de ces contributions co-finance les opérations de lutte contre les urgences sanitaires, le reste étant d’abord consacré aux programmes d’éradication de la poliomyélite, à l’amélioration de l’accès aux services de santé et à la prévention et la lutte contre les épidémies. L’OMS a donc d’ores et déjà appelé ses partenaires à compenser le retrait américain.
L’OMS et sa nouvelle Fondation
Deux jours avant l’annonce de Donald Trump, l’OMS a lancé une fondation « Fondation de l’OMS » destinée à accueillir des fonds privés de citoyens du monde entier. Cette Fondation permettra ainsi à l’organisation d’avoir une plus grande marge de manœuvre pour financer des programmes de santé.
Le secrétaire général a toutefois précisé qu’il ne cherchait pas à remplacer les Etats-Unis. Il a déclaré que l’organisation travaillait sur ce projet depuis un bon moment. “L’une des plus grandes menaces est le fait que moins de 20% de notre budget provient des contributions flexibles des États membres, tandis que plus de 80% sont des contributions volontaires, qui sont généralement affectées à des programmes spécifiques”.
Pour aller plus loin
- Trump announces U.S. withdrawal from the World Health Organization, Politico
- Don’t Leave the W.H.O. Strengthen It., The New York Times
- WHO’s Measured Reaction To Trump’s Pledge To Cut U.S. Ties To The Agency, NPR
- Trump Said He Would Terminate the U.S. Relationship With the W.H.O. Here’s What That Means, Time
- La dépendance de l’OMS aux fonds privés comporte des risques, Le Soir
- Le dilemme de l’OMS, Le Figaro International